Vénus noire !!Un film de Abdellatif Kechiche
La tombe où se trouve "les restes "de Saartjie baartman
Comment pourrait-elle échapper à son destin ? Le souhaite-t-elle vraiment? Que faire contre une société entière quand on est
seul ?Ce sont » les autres », les majoritaires, qui décident d’elle, cet objet de désir, de spectacle, sans cesse renvoyé à son statut d’esclave sans civilisation. Un cliché.
Quelle tâche plus noble pour un cinéaste que de lutter contre les clichés?
Vénus noire est le film le plus impressionnant, le plus ambitieux jamais réalisé par Abdellatif Kechiche
Pourquoi? Parce que le cinéaste français-tunisien prend un risque artistique inouï dans le cinéma contemporain en
choisissant de consacrer plus de deux heures et demie à un sujet et à un personnage a priori ingrat pour le cinéma français : une jeune femme noire au destin terrible.
Kechiche évite toutes les facilités : loin de se prêter à une hagiographie extatique de cette Noire exploitée, ne
cherchant pas à nous faire pleurer en utilisant des procédés cinématographiques efficaces et putassiers, il place son film sur un axe singulier, le désespoir, et n’en déviera jamais.
Pire, il tient son personnage principal à distance de nous, refuse de pénétrer sa psyché et le maintient dans l’opacité.
Que pense Saartjie? Que ressent-elle ?
« Vénus noire « est un film d’une noirceur totale mais incandescente, radical au sein d’un genre mainstream
(le biopic purement narratif) qui n’avait rien donné d’aussi beau depuis peut-être le Van Gogh de Pialat. Et il fallait bien de l’inconscience et de la foi en son art de la part d’un cinéaste
français-tunisien pour oser réaliser un tel film dans le paysage industriel cinématographique actuel.
Il fallait sans doute aussi être devenu un cinéaste aimé, acclamé (César à la pelle) et maîtrisant son outil pour
trouver les moyens de le réaliser.
Certains avanceront que le film est répétitif. Oui, Kechiche filme très longuement, jusqu’à épuisement du spectateur,
ces scènes horribles de spectacles forains, mondains ou scientifiques où Saartjie, qui se voulait danseuse, doit simuler ce qu’elle n’est pas : une sauvage, un monstre.
Mais le désespoir est là, dans la réitération, le ressassement, l’impossibilité d’échapper à son destin. Des humanistes
anglais essaient de la faire libérer grâce à la loi? Ils sont déboutés, à la fois par la justice et la mise en scène : Saartjie est prisonnière de son image et de sa monstruosité – comme l’était
L’homme qui rit, roman sublime de Victor Hugo auquel on pense souvent.
On pourrait juger que Kechiche utilise pour cela des outils disproportionnés, éprouvants pour un spectateur déjà acquis
à sa cause. Mais ils ne font que refléter la volonté de convaincre et la colère qui l’habitent. Et le spectateur averti ne peut que se laisser emporter, dès les premières secondes, par la
puissance et la précision de sa mise en scène, mais aussi son instabilité.
Le monde que nous montre cet artiste, avec un regard terrifié et terrifiant, sans doute paranoïaque (et il y a des
raisons de l’être), où seul un peintre saura voir Saartjie pour ce qu’elle est, c’est-à-dire une femme pudique, ne peut se gargariser de fixité, de lignes de force, de perspective.
La conter et la mettre en scène avec "Vénus noire" relève assurément pour Abdellatif Kechiche d’un devoir de mémoire.Le
fait que la figure de la Vénus trouve des échos jusque dans l’actualité la plus récente suffit à légitimer le film. Mais on se serait bien passé de cet éternel retour du même.
Mais «l'acte le plus barbare», estime-t-il, fut la dissection de cette femme: elle avait refusé de son vivant de se
montrer aux scientifiques, qui n'ont pas hésité pourtant, après sa mort, à violer sa volonté: «Jusqu'où peut-on aller pour réaliser une ambition?» demande-t-il.
Interpellé en conférence de presse sur la longueur du film (2 heures 39) et sur la répétition de scènes d'exhibition,
qui placent le spectateur dans la position du voyeur de l'époque, il s'est défendu de toute complaisance: «On a une progression dans l'exhibition du corps, un chemin vers l'abîme, jusqu'à
l'épuisement, puis la mutilation».
Cette histoire de classe, de mépris et de préjugés reste «hélas très contemporaine», estime-t-il aussi, en dressant le
parallèle avec les expulsions de Roms, en France.
«On vit une période où les mots sont libérés sur le racisme et la xénophobie. J'ai voulu rappeler un passé qui n'est pas
si lointain ni très glorieux pour nous Français. Et dire aussi: attention à l'étranger qui vient vers nous, à ne pas le considérer comme un être différent ni à le mépriser».
Il fallait tout le talent d’Abdellatif Kechiche pour exhumer ce passé, pas si lointain puisque le cerveau et les organes
génitaux de Saartjie Baartman ont été exposés au Musée de l’Homme à Paris jusqu’en 1976. Quant aux restes de Saartji Baartman, ils furent rapatriés en Afrique du Sud en 2002.
Mesdames et Messieurs; je vous accorde la parole,car Moi , La Voix Pure , devant "ça" , j'ai perdu la Voix!
J'espère que vous avez compris maintenant pourquoi je vous ai dis avant la publication de cette "histoire", "avant
de voir ce qui va suivre, profitez de votre Dignité!!!
Posté par La Voix Pure, le 05/11/2010