Compartiment - C - Voiture - 193
Edward Hopper-1938-
Ce qui accroche le regard, c’est d’abord cette femme assise au bout de la banquette couleur émeraude.
Pourquoi n’est-elle point du côté de la fenêtre, serait-elle accompagnée par quelqu’un qui serait sorti se dégourdir les jambes dans le couloir, laissant vacant ce côté de la banquette ? ou serait-ce une simple fantaisie de sa part, que de s’asseoir là, par dédain pour le paysage crépusculaire défilant au travers de la petite lucarne ?
La lumière venant d’en haut éclaire tout ce qui l’entoure, les murs latéraux vert pâle, celui surplombant la fenêtre avec son vert plus foncé couleur d’étang, la lampe argentée accrochée en haut vers la gauche de la fenêtre, les bordures de la fenêtre dont les dorures aux poignées rappellent la chevelure blonde échappant en dessous du chapeau de feutre sombre coiffant la jeune femme, une chevelure d’autant plus rayonnante qu’elle contraste avec la blancheur bleutée du repose-tête de la banquette, tout le décor intérieur est illuminé, elle seule garde son mystère. Son chapeau de feutre de couleur sombre cache le haut de son visage en jetant de l’ombre sur l’autre moitié. Sa tête est penchée vers le bas. Elle est absorbée dans une lecture, celle d’une revue, ou d’un magazine,
Son tailleur bleu nuit moulant une poitrine généreuse , sa main gauche blanche et fine tient les pages déployées de l’ouvrage, la mains droite se perd de l’autre côté des pages que sa posture dissimule au regard de l’observateur indiscret, un regard qui se trouve attiré par le reflet de la soie sur les jambes élégamment croisées aux genoux découverts.
Un petit cahier bleu traine nonchalamment sur la banquette sans la moindre proximité de stylo pour écrire.
Cette présence fascine, subjugue, fait rêver : Qui est-elle ? Où va-t-elle ? Pourquoi tant d’indifférence à tout ce qui l'entoure ?
Le mystère reste intact.
Blanche Colombe, le 29/12/2010