La fascination des mots
Mots doux pour les amoureux,
Honteux dans la bouche des peureux,
Puissants dans la gorge des martyrs,
Stridents pour crier toute mon ire,
Sourds pour le prisonnier muselé,
Mains coupées pour le poète esseulé,
Cordes cassées de ma guitare bâillonnée,
Inaudibles pour mon fou désarçonné.
Les mots sortent de ma tête,
Ils coulent et envoûtent mon être.
Ma boussole cherchant le Nord
Exilée de tous les ports.
Je veux leur faire un écrin,
Les protéger du crachin,
Leur coudre un fourreau,
A l'abri des vents et des eaux.
Les mots sont libres et ivres,
Dansants dans mes livres.
Lucioles et papillons
Traversent le temps par les sillons,
Par les pores de nos poteries,
Dans la trame de nos tapis,
Sur la crinière des chevaux,
Incrustés dans les émaux
Des fibules et des bracelets
De nos femmes ensorcelées
Par la magie des bijoux ,
Des tatouages sur leurs joues
De la tablette d'argile au disque de Phaïtos
De ce roseau en biseau à cette plume d'os,
du papyrus du Nil,
je navigue d'île en île,
De la pierre de Rosette
A ces dessins de cueillette.
De la plume sur la soie de Chine
De ces scribes qui s'échinent,
aux parois du Tassili
Joutes oratoires en izli.
On y met des mots barbares
Dans les cases tout est art
Hiéroglyphes et pictogrammes,
Puzzles, rébus et idéogrammes,
Pour trouver la solution
De cette énigme sans ablution.
Les mots sont persistants,
Le sens est percutant
Comme le froid de l'Atlas
Malgré la tente et la paillasse.
Les mots sont un baume
Sur la blessure des Hommes
Ou un fin cimeterre
Rasant tout sur la terre
- Izli: chants d'amour féminins
Fatiha Ould-Hocine